Un film que je vous recommande. Il y a des images de tendresse. Mais il est néanmoins sous-tendu par une incroyable violence. C’est la réalité. Vous parlez de tout ce que la vache « nous donne » ? Quel beau mythe. En réalité on le lui prend.
L’intention de Bernard Bloch était de montrer (sans paroles) « seize tableaux sur les destins mêlés des vaches et des hommes à travers le monde. Effet miroir, effet d’une relation qui s’incarne dans les gestes, et les comportements, dans les attitudes et les réflexions de ceux qui s’occupent des vaches. » Il l’a fait : en Europe, en Afrique, en Inde et au Brésil. Il y a l’exploit du film. Il y a les images, au premier degré, et le message, au deuxième degré, que vous trouvez vous-mêmes. Mais attention : les représentations culturelles n’ont guère de sens pour la vache.
Dans la salle, la seule chose quasiment que les éleveurs ont dit était qu’ils traitent bien les vaches parce que cela se reflète au niveau de la productivité. Je suis sûre qu’ils auraient pu dire d’autres choses, mais ce n’était sans doute pas l’endroit, personne n’était inspiré. Dommage.
Car il me semble important de trouver des mots qui soient authentiques et qui ne sortent pas de la boîte de « comm » d’un syndicat agricole quel qu’il soit (j’insiste).
Mon avis est que la relation des hommes avec les vaches ne peut pas continuer comme elle a été.
Il y a deux grands changements.
Le premier, c’est qu’aujourd’hui nous reconnaissons (pas encore tous…) la sensibilité des vaches, leur douleur, leur peur et leur bonheur. Bernard Bloch a bien montré la douleur (déjà dans son précédent film « Même pas mal »), et aussi la peur. Ce qui manque le plus c’est le bonheur. Celui qu’il ne faudrait pas casser.
L’autre grand changement c’est que nous sommes plus de 7 milliards d’hommes sur terre et que nous détruisons la planète. L’amour des grands troupeaux est merveilleux, mais il a déjà conduit à la catastrophe. Aussi, les investisseurs s’en sont emparés. Fermes de 1 000, de 3 000, 20 000 vaches… et même de 100 vaches : qu’est-ce qui change pour la vache, une fois qu’elle ne peut plus pâturer ?
Le changement climatique assèche les pâturages. Les forêts brûlent pour de la viande. Le lobby génétique fait ses affaires, en sélectionnant sur la performance, de lait ou de viande. L’industrie laitière envahit la planète comme faisaient les conquérants. Pauvres vaches, et malheur à leurs veaux (orphelins). Pauvres taureaux, robots vivants soumis par un anneau passé dans le nez. Misérable fierté humaine. Dégoûtante industrie laitière.
Pour moi, c’est Non. Je ne suis pas végétarienne, la mort est naturelle. Mais ma conscience ne me permet plus de consommer des produits laitiers et la viande bovine comme si de rien n’était. Il faut arrêter. Il faut tout recommencer. Autrement.
Anne Vonesch
Pour en savoir plus :
Pourra-t-on encore consommer des produits laitiers ?
Par Christian Rémésy, nutritionniste, directeur de recherche INRA